Paru en France en 2014

L’improbable duo composé de Stephen Baxter et Terry Pratchett récidive avec la suite de La longue Terre, intitulée La longue Guerre. Au regard du côté addictif du premier opus, où se dévoile cette infinité de Terres parallèles qui chamboulent soudainement l’univers humain, la barre était haut placée.

Et la suite, quoique toujours très agréable à suivre, n’atteint malheureusement pas ce niveau. Dans La Longue Guerre, qui ressemble beaucoup à un volume de transition vers des opus ultérieurs, les points de vues sont plus nombreux et l’on passe d’un personnage à l’autre à travers diverses scènes se déroulant dans les mondes parallèles.
La première moitié du livre n’est faite que de ça et cela en devient franchement inquiétant. On ne sait pas où les auteurs veulent en venir, il n’y a guère de révélations, seulement une tentative, parfois maladroite, de montrer à quel point la nature conflictuelle de l’homme persiste même avec une infinité de mondes et de ressources à disposition. Nous suivons donc les difficultés de pionniers à établir une justice, les villes rebelles refusant le rattachement à la Primeterre, les pro et anti-passeurs, les équipages de dirigeables militaires, produits en série, qui sillonnent les Terres pour ramener l’ordre avec une légitimité discutable. Les espèces inférieures, notamment les trolls, sont menacées d’esclavage parce que les humains ne les comprennent pas... Le récit tombe parfois dans l’antiracisme gentillet, mais on saluera l’intention. Si le paysage est brossé, tout cela manque de fil conducteur.

Heureusement, dans la deuxième moitié, on retrouve un peu de ce qui avait fait le sel du premier roman : de l’exploration, de l’aventure, de nouvelles espèces intelligentes, et le retour de quelques personnages comme l’explorateur Josué Valienté, Sally Linsay etc. Les pages se tournent franchement plus vite.
On regrettera que le personnage de Lobsang, intelligence artificielle dont le cynisme et la répartie étaient si jouissives dans La Longue Terre, soit beaucoup moins présent dans cet ouvrage. Et toujours au chapitre des points négatifs : il n’y a pas de guerre. Le titre est plus ou moins justifié par une petite phrase opportuniste à la fin du bouquin, mais à mon sens appeler ce tome La longue Guerre crée de fausses attentes.


Cela fait beaucoup de point négatifs, mais il ne faut pas oublier que l’on part d’un roman coup de cœur, et que cette suite un poil plus laborieuse entraîne forcément une déception. Mais la plume demeure fluide et agréable, et la force du concept des Terres parallèles garde son souffle, notamment sur la fin du livre. On donne donc encore une chance à cette série dont ce volume sera, espérons-le, le seul épisode un peu mou.